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Le phoque et les goélands

Publié le par DL

Sur la plage de Tréogat (Finistère), des goélands, un adulte (Larus fuscus) et un juvénile, ont entrepris de dépecer le cadavre d'un phoque que la marée a déposé sur le sable. Janvier 2023.

Ils sont bientôt rejoints par un second adulte. 

Liens:

https://www.lpo-idf.fr/index.php?pg=sp&sp=96

https://www.oiseaux.net/oiseaux/goeland.brun.html

Publié dans Faune littorale

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Potentille des oies à Plovan

Publié le par DL

A l'arrière du cordon de galets qui borde la plage de Kergalan en Plovan (Finistère), un tapis de plantes rases couvre une surface assez importante. Mai 2023.

Ce sont des pieds de potentille des oies (Potentilla anserina) aussi appelée potentille ansérine

Compte tenu de la coloration argentée de ces spécimens, il s'agit de la variété Potentilla anserina var. sericea Hayne.

Elle se développe en produisant des stolons pouvant atteindre 50 cm de long.

Selon l'Inventaire National du Patrimoine Naturel (INPN), cette plante aime les "communautés vivaces des plages de sable boréo-arctiques", les "gazons à sagine de marais salés", les "tapis atlantiques à Argentina anserina", les "pâtures mésotrophes à eutrophes humides ou mouilleuses" et les "plages de galets de l'Atlantique, de la Baltique et de l'Arctique".

Ce site, dont le sol est composé de galets et de sable, se trouve non seulement en arrière du cordon de galets, mais aussi en bordure de l'étang de Kergalan et peut se trouver occasionnellement inondé lorsque celui-ci déborde après des épisodes de pluie abondante ou quand une tempête comble son exutoire avec des galets.

La potentille des oies aurait un intérêt en phytothérapie.

Liens:

https://fr.wikipedia.org/wiki/Potentille_ansérine

https://inpn.mnhn.fr/espece/cd_nom/83714

https://zenodo.org/record/3077346

Publié dans Flore littorale

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Déchets de réparation de filets et de cordages

Publié le par DL

Sur les plages du Sud Finistère, on trouve souvent des déchets de réparation de filets et de cordages de casiers dans la laisse de mer. Ici sur les plages de Tréogat et Tréguennec (Finistère).

Ce sont les pêcheurs qui s'en débarrassent dans la mer alors qu'ils effectuent une réparation sur leur bateau.

Maintenant fabriqués en matières synthétiques imputrescibles, ces déchets ne sont dégradés que par l'action des ultra-violets. S'ils ne sont pas ramassés par des promeneurs et jetés dans les bacs à marée disposés de place en place, selon leur taille, ils mettront des décennies, voire des siècles à se dégrader. 

Jadis, filets et cordages étaient fabriqués en matières végétales qui pouvaient se dégrader naturellement. Et beaucoup de réparations se faisaient à terre.

Le montage qui suit est à regarder en mode "plein écran".

Publié dans Laisses de mer

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La protection des gravelots à collier interrompu

Publié le par DL

Sur la plage de Kermabec en Tréguennec (Finistère), des enclos et des cages ont été installés sur le sable et les galets. Juin 2023.

Des piquets délimitent les enclos.

Ce dispositif, destiné à protéger les nichées de gravelots à collier interrompu (Charadrius alexandrinus), espèce d'oiseau considérée comme menacée par l'Union internationale pour la conservation de la nature, est mis en place par les communautés de communes du Pays bigouden et par Bretagne vivante.

Le même et la femelle couvent directement sur le sable ou les galets 3 œufs dont l'aspect et la couleur les confondent avec le substrat. 

Les enclos servent à signaler la présence d'une couvée aux personnes fréquentant la plage, qui sont invitées à ne pas s'en approcher. Les cages interdisent aux prédateurs (goélands, corneilles, chiens non tenus en laisse en contravention avec l'interdiction de leur présence sur les plages en cette période de l'année) de détruire œufs et poussins.

Les photos qui suivent ont été prises au téléobjectif.

 

 

Publié dans Faune littorale

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Les moulins de Saoutenet en Plogoff

Publié le par DL

A Plogoff (Finistère), quand on parcourt le sentier côtier (GR34) entre Pors Loubous et Feunteun Aod, on peut remarquer une curieuse installation en forme de niche au milieu d'un long mur de pierres sèches qui barre un vallon au fond duquel coule un ruisseau.

Du moins peut-on voir cette construction quand la végétation n'est pas trop haute.

Photos prises en mars 2023.

En été, quand la végétation croît, iris des marais et roseaux masquent presque entièrement l'ensemble, mur de pierres et niche.

Photo prise sur le sentier côtier à l'Est de la construction en juin 2023. La flèche marque la position de la niche visible sur la photo précédente. 

Photo prise sur le sentier côtier à l'Ouest de la construction en juin 2023.

Photo prise sur le sentier côtier à l'Ouest de la construction en mars 2024

Photo prise sur le sentier côtier à l'Ouest de la construction en mars 2024.

Il s'agit de ce qui subsiste des installations de deux moulins à eau aujourd'hui disparus.

Ces vestiges consistent donc essentiellement en ce mur de pierres sèches qui barre le fond de ce vallon et qui faisait barrage à l'écoulement du ruisseau, formant ainsi un bassin de rétention. Ce bassin était une réserve d'eau servant à faire tourner des roues à aube horizontales (ou roues pirouettes) actionnant des meules.

Sur cette photo aérienne du 9 juin 2005, on distingue le mur de pierres qui barre le vallon. Le bassin de rétention se trouvait au Nord. Source: remonterletemps.ign.fr

Le bassin de rétention était lui-même alimenté par un ruisseau principal prenant sa source au village de Kerudavel et par un ruisseau secondaire prenant sa source près de Kervergar.

Réseau hydrographique qui alimentait le bassin de rétention des moulins de Saoutenet. La flèche pointe la localisation du mur de barrage du bassin de rétention. Source: géoportail.ign.fr

La face intérieure du mur de pierres était nécessairement rendue étanche par l'application d'un matériau imperméable du type argile.

Une vanne commandait l'écoulement de l'eau dans un canal alimentant la roue du premier moulin établi immédiatement au pied du barrage. Cette roue actionnait une meule située au niveau supérieur du moulin et tournant sur une meule dormante. C'est un système courant à l'époque. On le trouve au moulin de Tréouzien en Plouhinec, à celui de Pen an Veur en Loctudy, à celui de Keridreuff en Pont-Croix, etc.

Pirouettes doubles avec arbres en bois. Moulin de la Mousquère, 65170 Sailhan. Tous droits réservés.

Un autre canal conduisait ensuite l'eau jusqu'à la roue du second moulin situé une trentaine de mètres en aval du premier.

Roue à godets horizontale découverte lors de la restauration du moulin de Tréouzien à Plouhinec (Finistère) qui fonctionnait selon ce principe.

L'eau allait enfin se jeter dans la mer du haut de la falaise bordant le côté Est de la pointe de Diameur.

Cadastre de Plogoff. Section 1 de Penneac'h. 1836. Extrait. Source: archives.finistere.fr

D'après le plan du cadastre, le premier moulin, de forme rectangulaire, mesurait environ 10 mètres de long par environ 5 mètres de large. Le second moulin, de forme carrée, mesurait un peu moins de 5 mètres de côtés.

Matrice cadastrale de Plogoff. 1836. Extrait. Source: archives.finistere.fr

Matrice cadastrale de Plogoff. 1836. Extrait. Source: archives.finistere.fr

Un chemin bordant le côté Ouest de l'ancien bassin de rétention permettait d'accéder aux moulins depuis le village de Saoutenet pour y amener le grain à moudre et en emporter la farine.

Le chemin conduisant au village de Saoutenet. A droite, le bassin de rétention envahi de roseaux.

Carte postale de simple illustration.

On sait vraiment très peu de choses sur l'histoire de ces moulins, les archives disponibles sur Internet sont quasiment muettes à leur sujet.

La plus ancienne mention les concernant trouvée à ce jour, est la représentation du symbole d'un moulin sur la carte dite de Cassini, levée vers 1783.

Cerclé de rouge, ce symbole représente les deux moulins de Saoutenet. On remarquera que les ruisseaux alimentant ces moulins sont assez précisément représentés (comparer à la carte du réseau hydrographique ci-dessus). Extrait de la carte de Cassini, feuille de Quimper, levée vers 1783. Source: gallica.bnf.fr

Malgré leur proximité de la côte, ces moulins de Saoutenet ne sont pas représentés sur les cartes marines quelque peu précises (1771-1785 et 1817), parce que, masqués à la vue des marins par le rebord des falaises de la pointe de Diameur, ils ne pouvaient servir d'amer, contrairement aux moulins à vent. En revanche ils sont mentionnés sur la carte dite de l'Etat Major, levée en 1848.

"Mlin de Sautenet". Extrait de la carte de l'Etat Major levée en 1848. Source: géoportail.ign.fr

Grâce au premier cadastre de Plogoff, établi en 1836, on sait à qui les moulins de Saoutenet appartiennent à cette date: un certain André Marchand du village de Kerudavel. Nous y reviendrons plus loin.

Mais avant ... quand ont-ils été construits et qui les a construits, avec leur bassin de rétention ? Qui en étaient les meuniers ?

On sait seulement qu'ils existaient vers 1783, date à laquelle ils figurent sur la carte de Cassini, mais on ne dispose pas d'informations les concernant pour les périodes antérieures. On ne peut donc se référer qu'aux règles générales s'appliquant aux moulins sous l'ancien régime.

Sous l'ancien régime, la construction d'un moulin était un privilège de la noblesse et des institutions religieuses. D'ailleurs, le plus souvent, eux seuls disposaient des importantes ressources financières indispensables pour construire et équiper un moulin. Les moulins, en particulier les moulins à eau, étaient banaux, c'est-à-dire que les personnes vivant sur les terres d'un seigneur étaient tenues d'y faire moudre leur grain. A ce titre, ils devaient au seigneur un droit de moute, en plus de la redevance due au meunier. Ce droit de moute s'élevait à 1/16ème de la farine produite.

Cerclés de rouge, les moulins à vent de Plogoff figurant sur la carte de Cassini levée vers 1783. Source: gallica.bnf.fr

A Plogoff, les terres et ceux qui y vivaient dépendaient de plusieurs seigneuries. Certains dépendaient directement du roi, d'autres du marquisat de Pont-Croix et d'autres encore des régaires de Cornouaille, c'est-à-dire de l'évêque de Quimper. Cela dit, il n'a pas été possible de déterminer de quel seigneur avaient dépendu les moulins de Saoutenet.

On ne sait pas davantage à quelle date et à quelle occasion ils sont devenus la propriété d'André Marchand du village de Kerudavel. Qu'ils aient initialement appartenu au roi, à un noble ou à l'évêque de Quimper, il est probable qu'ils sont passés en des mains roturières lors de la Révolution. Il est possible que, comme l'ensemble des biens du clergé, ils aient été "mis à la disposition de la Nation" par le décret du 2 novembre 1789, et vendus pour rembourser les dettes de l'Etat. Ou encore qu'ils aient été confisqués à une noblesse émigrée à l'étranger.

C'est justement lors de la Révolution que la famille Marchand de Kerudavel fait parler d'elle. On sort maintenant de l'histoire des moulins de Saoutenet pour plonger dans celle d'un personnage, et à travers lui de tout un territoire, le Cap Sizun, pendant la période troublée de la Révolution française (1).

Ce personnage, c'est André Marchand, du village de Kerudavel, le père d'André Marchand, propriétaire des moulins de Saoutenet en 1836.

Est-ce lui qui a acheté ces moulins lorsque les biens d'Eglise et de la noblesse émigrée ont été vendus, et qui les a transmis à son fils par héritage ou autrement ? Compte tenu de ses mauvaises relations avec les nouvelles autorités issues de la Révolution, on peut douter qu'il ait pu s'en porter acquéreur.

André Marchand père naît à Plogoff le 9 mars 1749 au village de Kerudavel, et le 26 septembre 1768, il épouse Françoise Kersaudy.

L'an mil sept cens soixante et huit le vingt et sixième jour du mois de Septembre, après les fiançailles faites en face d'Eglise, et les publications des Bans en cette paroisse dans les temps prescrits comme il ???? (conste ?) par ces présents registres, ne s'y étant trouvé aucun empêchement, je, soussigné prêtre délégué par monsieur Lorient recteur de cette paroisse, ayant interrogé dans cette église paroissiale André Marchand fils de Simon Marchand et d'Olive KSaudy de cette paroisse et Françoise KSaudy fille d'André KSaudy et d'Anne Normant aussi de cette paroisse, et reçu leur mutuel consentement par paroles de présent, les ay Solennellement conjoints en mariage en présence et du consentement de leurs dits et soussignans parents: Simon Marchand et André Ksaudy, d'autre Simon Marchand frère du nouveau marié, des soussignans Pierre Chever, Clete Carval, parens aliés au second degré du nouveau marié, Germain Marzin Beau Frère, et Jean Chever, cousin germain de la nouvelle mariée, tous de cette paroisse pris pour témoins, et ai ensuite célébré la Sainte messe, et leur ai donné la Bénédiction nuptiale selon la forme et cérémonies observées par notre mère la Sainte Eglise.

André Ksaudy        Simon Le Marchand        André Marchand      Jean Ksaudy        René Rozen témoins        Delu???      Alain trividic        Guillaume chever        Clette Le Moan
Germain Marzin       André Marzin témoins        Pierre Chever        Jean Ksaudy témoin        
 Jean Chever  Clette Carval          J. Marchand prêtre délégué     Lorient Rr de Plogof
 

Registre des Mariages, Baptêmes et Sépultures de la paroisse de Plogoff. Source: Archives départementales du Finistère.

On remarquera que cette cérémonie de mariage est célébrée par un "prêtre délégué" par le recteur de la paroisse, et qui signe "J.Marchand". Il s'agit sans doute de Jean Marchand, oncle paternel du marié, qu'on retrouve recteur de Camaret de 1769 à 1792 (2).

En 1769 le jeune couple Marchand-Kersaudy a une fille, Marie, puis une deuxième fille Olive-Marie en 1772, et leur premier fils, aussi prénommé André, en 1774. Suivront Simon-Marie en 1777 et Jean-Pierre en 1781 (3).

Kerudavel est une petit village. En 1795 (10 vendémiaire an IV), quand un tout premier recensement de la population est réalisé, 24 personnes de plus de 12 ans, composant 6 ménages y résident (4): les familles d'André Carval, André Kersaudy, André Marchand le père, Guillaume Barbéoch, Laurent Danzé et Jean Ynisan. A cette date, André Marchand, le fils, alors âgé de 21 ans, ne figure pas dans ce recensement. Peut-être est-il allé exploiter une tenue dans une commune voisine, peut-être est-il engagé dans la marine ...

Le 5 avril 1789, André Marchand le père assiste à la première assemblée du "général" de la paroisse (le "général" est l'entité politique délibérant des affaires de la population d'une paroisse) en vue de préparer la rédaction du cahier de doléances.

Aujourd'hui 5 avril mil sept cent quatre vingt neuf après la lecture nous faite de la lettre du roi pour la convocation des états généraux et de l'ordonnance de monsieur le Sénéchal de Quimper, le général de la paroisse de Plogoff s'est assemblé à la Sacristie, lieu ordinaire des délibérations à trois heures après midi, où étant, ledit général a nommé pour remplacer le juge ou son procureur fiscal qui n'ont pu s'y trouver, la personne de Pierre Chever capitaine du guet de la paroisse, pour former et rédiger le cahier de plaintes et doléances, Yves Mener, Germain Marzin, Paul Goardon, Simon Carval, Clet Yven et André Carval, tous paroissiens dudit Plogoff pour chiffrer et signer ledit cahier, André Marchand, Henri Normand, Guillaume Ksaudy et Martin Mevel, aussi paroissiens dudit Plogoff, et ont renvoyé au douze à l'issue des vêpres à nommer les députés que demande la lettre du roi et le règlement y annexé, et comme il était déjà tard, on a remis la délibération au six à sept heures du matin …

Suivent les doléances en 12 articles.

Cahier de doléances de la paroisse de Plogoff. Source: Archives départementales du Finistère

Dans son 9ème article, la population demande la suppression du droit de moute. On a vu plus haut que non seulement les habitants étaient tenus de faire moudre leur blé au moulin de leur seigneur, mais qu'en outre, ils lui devaient, en plus de la redevance due au meunier, un droit de moute s'élevant à 1/16ème de la farine produite.

C'est ainsi que débute la Révolution à Plogoff.

Le 12 juillet 1790, l'Assemblée nationale constituante adopte par décret la Constitution civile du clergé (5). Schématiquement, elle prévoit que:

- les diocèses auront dorénavant la même étendue et les mêmes limites géographique que les départements;

- le clergé régulier est supprimé (abbayes, prieurés, chapitres des cathédrales et des collégiales, etc.);

- les évêques sont désormais élus par les électeurs du département, les curés par ceux du district et ils reçoivent leur traitement de l'Etat;

Dénoncée par le pape, cette Constitution civile du clergé divise l'Eglise de France. Certains ecclésiastiques l'acceptent et prêtent serment à cette Constitution (curés assermentés, aussi appelés "constitutionnels" ou "jureurs"), tandis que d'autres s'y refusent (curés insermentés, aussi appelés "réfractaires"). Ces derniers perdent leur office et leurs revenus et sont interdits d'exercer leur ministère. Certains curés qui ont tout d'abord prêté serment se rétractent et deviennent à leur tour "réfractaires". Ils doivent laisser la place à un curé "jureur" et s'éloigner de leur paroisse.

"Moyen de faire prêter serment aux Evêques de Curés aristocrates, en présence des Municipalités suivant le décret de l'Assemblée Nationale." Caricature d'époque.

Cette Constitution civile du clergé divise non seulement l'Eglise de France, mais aussi une population dont une partie est déjà réticente à soutenir la Révolution en raison des nombreuses réquisitions ordonnées par le nouveau pouvoir (grains, bétail, chevaux, métaux, cuirs, etc.). C'est le cas dans le Cap Sizun et particulièrement à Plogoff, terre à la fois agricole et grande pourvoyeuse de prêtres aux 17° et 18° siècles (6).

Dans la liste des prêtres originaires de Plogoff établie par le chanoine Henri Pérennes, figurent 3 personnages nés à Kerudavel, attachés aux Marchand par des liens familiaux. Bulletin diocésain d'histoire et d'archéologie de 1940. Source: bibliothèque diocésaine de Quimper.

Les prêtres "jureurs" sont mal acceptés dans les communes, et les prêtres réfractaires demeurés sur place continuent d'exercer leur influence sur leurs anciennes ouailles. Ainsi, le recteur "constitutionnel" de Primelin, Jean Gloaguen, voit les fidèles déserter son église pour aller assister aux offices dans des chapelles pourtant interdites où le vicaire réfractaire de la paroisse continue de célébrer la messe.

Recherchés, les prêtres réfractaires se cachent avec la complicité active de la population. Jean Guézengar, curé de Pleyben originaire de Plogoff, refuse de prêter serment à la Constitution civile du clergé, et se réfugie dans la maison paternelle de Landrer où une cache a été aménagée. Yves Le Dréau, né à Brézoulous en Cléden, quitte sa cure de Trébalay pour se réfugier chez lui où il se cache. Certains se cachent dans les grottes de la côte, y compris à la pointe du Raz, d'autres dans des taillis ou dans une "maison de four".

Arrestation d'un curé réfractaire.

André Marchand père est certainement d'autant moins porté à soutenir la Révolution que sa propre famille compte un prêtre réfractaire en la personne de son oncle paternel, Jean, recteur de Camaret, et que dans les familles alliées, Kersaudy, Chever, Carval, Rozen, il y a, ou il y a eu des prêtres, comme on l'a vu sur la liste qui précède. 

André Marchand est signalé aux administrateurs du district de Pont-Croix en octobre 1793 (7).

« Du troisième jour de la première décade du second mois de l'an deuxième de la république française, une et indivisible. (24 octobre 1793).
Séance publique du conseil tenue par ML Grivart assisté de Y Béléguic, G Bescond, Mombet, Y Riou, Yves Pellé, administrateurs et G Béléguic.
Présent A L Tréhot procureur sindic.
Le conseil considérant que la conduite des citoyens de Plogoff est un exemple continuel de résistance à la loi et qu'il est urgent de faire rentrer ces rebelles dans le devoir et de punir les principaux chefs qui les ont égarés.
Après avoir oui le procureur sindic.

Arrête que le lieutenant de la gendarmerie nationale de Pont-Croix fera mettre au plus tôt en arrestation :
1° le citoyen Yves Riou de Lestrevin en Plogoff justement suspect d'incivisme pour ses propos journaliers contre la révolution et spécialement pour avoir fait déserter l'un de ses fils du recrutement du mois de mars et empêché l'autre ne se rendre à Audierne lieu désigné pour le rassemblement des citoyens du canton de Cléden mis en réquisition par la loi du 23 août 1793
le citoyen André Marchand de Kerudaval pour sa conduite contre-révolutionnaire, ses liaisons avec les prêtres rebelles et désigné pour un mauvais citoyen par la voie [sic] publique.
3° Yves Ladam du bourg de Plogoff désigné aussi comme les deux autres pour un mauvais citoyen. 
...

Arrêté les dits jour et an.»

Quelques jours plus tard, Des proches s'étant portés cautions, il est temporairement libéré pour régler des affaires de famille. 

« Du 18e jour du second mois de l'an deux de la république française, une et indivisible. (9 novembre 1793)
Séance publique du directoire tenue par Grivart assisté de Mombet, G Bescond administrateurs. Présent A L Tréhot procureur sindic.
Se sont présentés les citoyens Pierre Chever de Kervelgar en Plogoff et Germain Kersaudy de Brehonnet en Goulien, lesquels ont déclaré se rendre solidairement caution du citoyen André Marchand du village de Kerudavel en Plogoff, actuellement en arrestation à Pont-Croix, et prient le directoire d'accorder l'élargissement du dit citoyen André Marchand pour l'espace de temps de trois semaines ayant des affaires de famille très pressantes et s'obligent de le conduire à la maison d'arrêt dans le dit délai, et ont signé. [suit la signature].

Le directoire vu la déclaration des citoyens P Chever et Germain Kersaudy de cautionner le citoyen André Marchand.
A avoir oui le procureur sindic.
Arrête que le concierge de la maison d'arrêt à Pont-Croix mettra en liberté le citoyen André Marchand parce que ce dernier payera préalablement les frais de gîte et de geôlage.

Arrêté les dits jour et an.»

Pierre Chever, qui se porte caution, était en 1768 témoin au mariage d'André Marchand et Françoise Kersaudy, et il était dit "capitaine du guet de la paroisse" lors de la rédaction des cahiers de doléances en avril 1789. Germain Kersaudy est le mari de Jeanne-Olive Trividic, cousine germaine d'André Marchand.

Les prisons de Pont-Croix ! Voyons ce qu'en pense Jacques Cambry, chargé par le département du Finistère de dresser un état du département. Dans son "Voyage dans le Finistère ou Etat de ce département en 1794 et 1795" (8), il écrit:

« Les prisons sont exécrables, mais presque toujours vides » ! On peut se demander quel crédit accorder à l'envoyé du département qui a jugé par ailleurs, à propos du district de Pont-Croix, que « C'est un pays calme, tranquile; de sages administrateurs y maintinrent la paix, dans le moment où le reste de la France étoit en proie à tant de fureurs. Les lois étoient suivies avec exactitude, mais sans inhumanité. Les prêtres assermentés ont vécu tranquilles dans le district de Pont-Croix; aucune insurrection ne s'est manifestée dans son étendue, la plus entière liberté régnoit dans les opinions; les contributions s'y sont levées avec facilité. » 

André Marchand, revenu à la prison de Pont-Croix, y est toujours en juin 1794:

« Du 11e jour de messidor, an second de la République française, une et indivisible (29 juin 1794)
Séance publique du directoire tenue par JF Gueguen, assisté de Y. Béléguic, G Bescond, Y Riou administrateurs. Présent ML Grivart agent national provisoire.
Le directoire vu la liste des personnes détenues en la maison d'arrêt en état de nourrir les détenus pauvres
Le mémoire du garde concierge pour nourriture à raison de 20 sols par jour, portant jusque et compris le 4 messidor présent mois à la somme de 306 livres.
La pétition du même concierge pour son salaire de gardage à celle de 51 livres 17s 6d à raison de 33s 9d par jour et formant ensemble une somme de 357 livres 17s 6d.
Considérant qu'il n'y a dans la maison d'arrêt après examen que quinze personnes entre [entrés ??) riches et en état de nourrir les trois pauvres détenus.
Vu la loi du 26 brumaire, l'agent national provisoires entendu.
Arrête de répartir entre les 15 personnes riches et en état la somme de 357 livres 17s 6d comme suit, savoir :
Jacques Boulin 15lt              Anne Guével 15lt              Allain Burel Plozévet 16lt
Allain Strullu idem 16lt          Yves Gueguen 15lt               Clet Gloaguen Cléden 8lt
Jean Bourdon Plozévet 15lt    Yves Riou 8lt Plogoff     André Kersaudy idem 8lt
Denis Riou 60lt 3s 3d        André Marchand idem 8lt     Anne Borlogot 46lt 15s 6d
Françoise Plouhinec 46lt 15s 6d    Billette Liladam 60 lt 3s 3d    Jeanne Jouan 20lt
2° Arrête de rendre le présent rôle exécutoire envers les personnes dénommées.
3° Que copie du présent sera remis au citoyen G. Dren garde concierge et par extrait aux personnes dénommées pour qu'elles aient à s'y conformer dans huitaine.
Arrêté les dits jour et an. »

Donc, les "plus riches" devront payer non seulement le salaire du "garde concierge" de la prison, mais aussi la nourriture des trois détenus les plus pauvres. On peut noter qu'André Kersaudy, sans doute le beau-père d'André Marchand, est aussi incarcéré à cette date. Ils ne sont pas parmi les plus aisés des détenus puisqu'ils sont appelés à contribuer pour seulement 8 livres chacun, alors que d'autres doivent payer 15 ou 16 livres et jusqu'à 46, voire 60 livres !

En août suivant, ils sont toujours incarcérés et appelés à contribuer à la fois pour les gages du concierge de la prison et la pension de 3 autres détenus:

« Du 17 thermidor, l'an second de la République française, une et indivisible (4 août 1794)
Séance tenue par JF Gueguen vice-président, assisté de G Bescond.
Présent Y Béléguic substitut de l'agent national
Vu les mémoires du citoyen le Dren, l'un portant à 84 livres pour pension de Henry Kersaudy, Jean Mével et Anne le Goff détenus dans la maison d'arrêt de Pont-Croix depuis le 11 messidor jusqu'au 2 thermidor et l'autre pour ses gages de concierge depuis le onze messidor jusqu'au quinze thermidor portant à 59 livres 1s 3d à raison de 30 sols par jour, les deux sommes faisant ensemble celle de 143lt 1s 3d.
Considérant que la loi du 26 brumaire ordonne expressément que les riches payeront pour les personnes qui sont dans l'indigence.
L'agent national entendu.
Le directoire arrête de faire ainsi qu'il suit sur les citoyens ci-après dénommés, la répartition de la somme de 143 lt 1s 3d due pour nourriture des détenus et gages du concierge, savoir :
André Marchand 15lt          André Kersaudy 15lt          Yves Riou 15lt
Yves Gueguen 15lt          Allain Strullu 15lt           Jean Bourdon 15lt
Clet Gloaguen 13lt           Jean Burel 12lt            Jean Kerloch 10lt 1s 3d
Jacques Bloch 9 francs        Daniel Cozic 9 francs
au total 143 livres 1s 3d
Arrête de plus que le citoyen Dren est autorisé à se faire payer par les contribuables ci dessus des sommes qui leur incombent suivant la répartition qui en est faite.
Arrêté les dits jour et an »

On n'en sait pas plus sur les démêlés d'André Marchand avec l'administration du district de Pont-Croix.   

Il meurt en mai 1811.

« L'an mil huit cent onze, le seize du mois de mai, par devant nous maire de la Commune de Plogoff, Canton de Plogoff Pont-Croix, Département du Finistère, sont comparu André Marchand Cultivateur domicilié à Kudavel, fils au deffunt, et André Sicourmat Cultivateur domicilié à Landrer, Beau fils au deffunt, lesquels nous ont déclaré que le même jour que dessus à quatre heures du matin, est décédé au Village de Kudavel André Marchand, âgé de Soixante trois ans, Veuf de Françoise Ksaudy, fils aux deffunts Simon Marchand et Olive Ksaudy, dudit lieu de Kudavel, les déclarants signent avec nous après que lecture en a été faite. 
André Marchand        Sicourmat         Carval maire    »

Registre d'état civil de la commune de de Plogoff. Source: Archives départementales du Finistère.
 

En France et en particulier dans le Cap Sizun, les tensions politiques et religieuses se sont alors apaisées. Certains prêtres qui avaient refusé de prêter le serment à Constitution civile du clergé ont retrouvé leur paroisse à la suite du Concordat de 1801. 

Que deviennent les moulins de Saoutenet ? D'après le premier cadastre de la commune de Plogoff, ils existent encore en 1836. Mais sont-ils utilisés ? Y porte-t-on toujours son blé à moudre ? Combien de temps vont-ils encore fonctionner avant d'être abandonnés et sans doute de tomber en ruine ? Autant de questions qui demeurent aujourd'hui sans réponse.

Liens:

https://kartenn.region-bretagne.fr/ws/recensement/detail.php?id=dev17012017_616128

https://patrimoine.bzh/gertrude-diffusion/dossier/les-moulins-sur-la-commune-de-plogoff/cc06621b-99ca-410a-9856-114f57978a49

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