Les antennes de la pointe de Brézellec
Sur la pointe de Brézellec en Cléden-Cap-Sizun (Finistère), un groupe d'antennes surprend le randonneur qui parcourt le sentier côtier.
Elles sont 4, maintenues par des haubans et disposées en rectangle.
Un panneau met en garde: "RAYONNEMENT ELECTROMAGNETIQUE / DANGER / DEFENSE D'ENTRER ".
Plusieurs centaines de mètres plus loin, un alignement d'autres antennes du même genre. Elles sont 16 et d'évidence, elles sont en rapport avec les 4 premières.
C'est étrange, le site où se trouvent les 4 premières antennes semble être à l'abandon (poteaux de clôture ayant supporté des barbelés, grillage effondré, friche), mais il y a quand même des équipements apparemment assez récents.
Ces antennes constituent un système de radar. Les 4 antennes disposées en rectangle servent à l'émission des ondes, et les 16 antennes alignées servent à la réception des ondes en retour. Les ondes émises sont de faible puissance (30 watts) et d'une fréquence de 12 Mhz.
Ce système radar (WERA ou Wellen Radar), d'origine allemande, est destiné à mesurer les courants en mer d'Iroise. Une installation similaire se trouve à la pointe de Garchine sur la commune de Porspoder, au Nord-Ouest de Brest.

Les pointes de Garchine et de Brézellec. Fond de carte: geoportail.gouv.fr
La mise en place de ces installations répond au besoin d'établir des prévisions de dérive d'hydrocarbures, de personnes, de bateaux ou d'objets divers en mer d'Iroise, particulièrement fréquentée et dangereuse.
Un premier modèle de prévision est mis au point en 1994 par la division Marine et Océanographie de Météo-France pour réagir aux pollutions par hydrocarbures: MOTHY (pour Modèle Océanique de Transport d'Hydrocarbures). En 1998, le système est étendu aux objets flottants (conteneurs, citernes, voiliers, homme à la mer, etc.). Lors d'une opération de recherche et de sauvetage, les Centres Régionaux Opérationnels de Surveillance et de Sauvetage (CROSS) peuvent demander une prévision de dérive qui les aidera à établir une zone de recherche.
C'est en 2004 que la pointe de Brézellec est pressentie pour l'établissement d'un radar WERA. La Marine Nationale y possède un terrain, concédé pendant quelques temps aux Phares et balises pour une station de radio-navigation.
En 2006 la société Actimar fournit un système de télédétection composé de deux radars Hautes Fréquences au Service Hydrologique et Océanographique de la Marine (SHOM).

Sur cette photographie aérienne du 12 août 1966, le site du terrain de la Marine Nationale. Source: remonterletemps.ign.fr
Compte tenu des dimensions de l'installation du radar de la pointe de Brézellec, la superficie du terrain de la Marine Nationale est insuffisante et une partie des antennes de réception doit être établie sur des terrains privés.

Schéma de principe de l'implantation du radar. Source: Florian Delrieu / Apport des données de radar HF pour la prévision de dérive en mer / Rapport de stage 2010-2011
Comment fonctionnent les radars de la pointe de Garniche et de la pointe de Brézellec ? Les 4 antennes disposées en rectangle émettent des ondes électromagnétiques en direction de la mer. Ces ondes sont réfléchies par l'eau et leur écho, modifié en fonction de l'état de la mer, est capté par les 16 antennes alignées. Bien que cet écho soit très faible, le radar détecte les caractéristiques des vagues qui l'ont modifié.
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Les radars sont configurés pour une portée de 150 km et une résolution de 1.5 km, et ils fournissent des observations toutes les ~10 minutes. La donnée visualisée est traitée, filtrée et mise à jour quotidiennement (informations communiquées par le SHOM Service Hydrologique et Océanographique de la Marine).
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Image produite à partir des données des radars HF des pointes de Garniche et de Brézellec, le 8 septembre 2020 à 15h30. Source data.shom.fr.
La prévision de dérive est calculée à partir des caractéristiques de l'écho recueilli et en tenant compte de différents paramètres influant sur l'état de la mer: la bathymétrie (profondeur de la mer), les données de marée, le vent, les courants (dus au vent et dus aux marées). Pour accéder à ces données, cliquer sur ceci: SHOM
Sur le site de Brézellec, comme on le voit sur les photos qui précèdent, cette installation est réduite à sa plus simple expression. Outre les 20 antennes émettrices et réceptrices, il n'y a que ce qui semble être un transformateur et une armoire électriques, et un petit local, grand comme un placard où sont vraisemblablement regroupés divers équipements.
Pourtant, ce site comporta des constructions plus conséquentes à l'époque où la Marine Nationale puis les Phares et Balises l'occupaient, comme en témoignent les photos qui suivent, que je dois à l'obligeance de Daniel Tiefenbach (voir, en fin d'article, le lien vers la page de son blog consacrée à ce site).








Liens:
Le rapport de stage de Florian Delrieu
Le rapport de stage de Nicolas Marchalot
Un article du Télégramme de 2004
Un article du Télégramme de 2005
D'autres photos du site au temps de la Marine Nationale